lundi 28 septembre 2015

La Mort de la Terre - J.H. Rosny Ainé


La Mort de la Terre - J.H. Rosny Ainé

  • Les navigateurs de l'infini (publié en 1925, manuscrit non daté). La première chose amusante avec cette grosse nouvelle, c'est qu'avec un titre pareil, on s'attend à un voyage aux confins du cosmos. Mais non, en fait les trois héros ne vont que sur Mars. On ne saura d'ailleurs rien des détails de leur voyage, ils ressemblent à trois gentlemen qui vont faire un safari en Afrique. Ils arrivent tranquillement sur Mars, se baladent et dissèquent les créatures qui croisent leur chemin. On sent instantanément que ce récit n'a pas très bien vieilli. Mais il est loin d’être inintéressant. Rosny Ainé invente sur Mars une faune assez variée. Il y a les Tripèdes, qui ressemblent à des humains et dont la civilisation est sur le déclin, les Zoomorphes, des créatures plates et dangereuses, parfois gigantesques, qui prennent petit à petit le pas sur les Tripèdes, et pour finir les Éthérés, êtres immatériels dont ne saura pas grand chose. Les héros vont aider les Tripèdes à lutter contre les étranges Zoomorphes, et le narrateur aura une invraisemblable amourette avec une femelle locale. Au delà de l'inventivité concernant la faune, il y une chose que j'ai trouvé fascinante dans ce récit : le rapport au corps. Les héros classent les êtres vivants et placent les Éthérés au dessus d'eux mêmes simplement parce qu'ils n'ont pas de corps, sans rien savoir d'autre sur eux. Quand aux pratiques sexuelles des Tripèdes, voici ce qu'en dit l'auteur : « Leur étreinte, car leur acte nuptial est une étreinte, est extraordinairement pure. C'est tout le corps qui aime, en quelque sorte immatériellement. Du moins, si la matière intervient, ce doit être sous forme d'atomes dispersés, de fluide impondérables. La naissance de l'enfant est un poème. [...] La naissance et la croissance primitive de ces êtres a quelque chose de divin, toute l'infirmité, toute la laideur terrestre en sont bannies, comme elles sont bannies de la caresse nuptiale. » Cette vielle haine occidentale du corps, cette séparation entre un esprit supérieur et une chair inférieure, est le thème le plus marquant de cette grosse nouvelle. 
  • Le cataclysme (1888, reparu en 1896 avec le titre final). La plus petite nouvelle du recueil, qui utilise très bien l'unité de lieu et de temps. Un couple, quelques domestiques, une maison isolée sur un plateau et des phénomènes inexplicables. Les personnages perçoivent des changements, se souviennent d'anciennes légendes, et finissent par céder à leur instinct pour s'enfuir en courant ... Juste un vague petit indice sur l'origine cosmique du cataclysme. Ce qu'il faut en retenir, c'est simplement que certaines choses, bien que probablement explicables scientifiquement, dépassent l'entendement humain, et la seule façon de s'en sortir, c'est de fuir.
  • La Mort de la Terre (1910). Une nouvelle fort intéressante de la part d'un auteur qui a beaucoup écrit sur l'origine de l'humanité (La Guerre du feu ...) : cette fois, cent mille ans dans le futur, c'est la fin de l'humanité. A cause de l'industrie humaine mais aussi pour des raisons naturelles, il n'y a quasiment plus d'eau sur Terre, juste quelques sources autour des quelles sont regroupés les derniers représentants de l'humanité. Plus pour très longtemps. Et dans les vastes déserts se baladent lentement les ferromagnétaux, espèce d'origine minérale que l'on suppose intelligente. Mais encore une fois, comme dans La Force mystérieuse et Les navigateurs de l'infini, la compréhension mutuelle est impossible, un règne est destiné à remplacer l'autre. Bien loin du minimalisme des apocalypses d'aujourd'hui (La Route, Mad Max ...), le début du récit est un peu lourd, la faute à trop d'exposition. Mais une fois que les enjeux se mettent en place, l'ambiance est vraiment là : l'humanité, triste et résignée, ne peut plus faire grand chose pour se sauver. Passer ses journées à voler dans le désert et explorer toutes les grottes possibles pour chercher de l'eau ... mais à quoi bon quand on est plus qu'une dizaine ? Franchement, pour un récit écrit en 1910, difficile de ne pas être enthousiasmé. La plus grande différence, c'est qu’aujourd’hui, après les deux guerres mondiales, les fictions mettant en scène la fin de l'humanité se passent dans un futur beaucoup, beaucoup plus proche ...
220 pages, denoël

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