samedi 27 octobre 2012

Le père Goriot - Balzac


Je poursuis donc ma lente exploration de l’œuvre de Balzac. Malgré le titre du bouquin et l'illustration de couverture, le fameux père Goriot n'est pas vraiment le personnage principal du roman : l'histoire est généralement contée du point de vue d'Eugène de Rastignac, figure récurrente dans la Comédie Humaine.

Le roman démarre, comme souvent chez Balzac, sur une description assez lourde, du genre de celles qui font décrocher la plupart des collégiens ou lycéens sensés lire le livre pour d'obscures raisons scolaires. Ce qui nous est présenté là, c'est la maison Vauquer, pension où se déroulera la majeure partie du récit, et ses occupants. Parmi eux, Rastignac, jeune étudiant de plus ou moins bonne famille venu de la campagne, et le père Goriot, souffre douleur de la pension qui, on l'apprend un peu plus tard, ne vit que pour ses deux filles. Rastignac aura l'occasion de s'introduire dans la vie mondaine parisienne, parmi les riches, le beau monde. Et comme l'on peut s'en douter, à la vue de tout ce faste, sa condition d'étudiant devant passer son temps à travailler pour un avenir banal, sinon médiocre, lui semble soudain bien inintéressante. Nous y sommes : le voilà qui se lance à l'assaut du monde. Enfin, "le monde", la haute société (histoire d'éliminer tout risque de confusion).

Cependant, contrairement par exemple au Bel-Ami de Maupassant, Rastignac n'est pas un simple arriviste, c'est même un homme plutôt bon, essayant de suivre ce que lui dicte sa morale. Malheureusement, la vie est bien cruelle, surtout dans les milieux qu'il va être amené à fréquenter. Il apprend rapidement que le père Goriot n'est pas un vieux sénile, mais le père de deux jeune femmes à qui il a offert toute sa fortune en guise de dot pour leur arranger de bons mariages. Mariages finalement ratés, ce qui fera bien l'affaire de Rastignac, puisqu'il deviendra l'amant de l'une d'elles. Et surtout, le père Goriot est délaissé par ses deux enfants : normal, il n'a plus d'argent. C'est là tout l'objet de roman : le pouvoir de l'argent, sa capacité à fausser les rapports humains, à introduire le mensonge, les succès et les échecs. L'argent n'est pas le seul problème, toute cette haute société est superficielle, dépravée, ne trouvant son bonheur que dans l'étalage de luxe et l'échange de ragots. Les problèmes amoureux ne sont dus qu'aux mariages hypocrites, effectués uniquement pour l'argent et le gain social, ne conduisant qu'au malheur. Le père Goriot pourrait être l'image même de l'homme simple et bon, mais non : il est insupportable à aimer ses filles plus que Narcisse n'aime son reflet, il mourra même d'amour pour elles (il devait bien falloir au roman une longue et dramatique agonie).

Le père Goriot est la peinture virulente d'un monde sombre et hypocrite caché sous de luxueux tissus et de brillantes pierres précieuses, et c'est pour cela que j'ai aimé le roman, même si l'écriture de Balzac, très étoffée, rend certains passages un peu longs, voir lourds. Il s'agit avant tout du parcours initiatique de Rastignac : un jeune homme aussi dégouté qu'attiré par la haute société, et qui finalement, désabusé, décide de se jeter dedans, car c'est la seule façon pour lui de vivre une vie intense et passionnante.

400 pages, 1835, Le livre de poche

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